Friday, 28 July 2023

La 6D-Marathon 2023


On court pafois de-ci de-là, pendant des années, puis un jour on s'inscrit à une course, et on réalise que quelque chose d'incroyable vient de se passer, que notre expérience du Trail vient tout juste de commencer.


Jeudi 27 Juillet / Berlin >> Aime

Je suis quelqu'un d'assez impulsif, qui sait saisir une occasion lorsqu'elle se présente. Un week-end de libre, femme et enfants en vacances dans la belle famille, une incroyable opportunité s'offre à moi: courir mon premier trail de montagne. Un rapide coup d'œil au calendrier, il y en a justement une, et pas des moindres: la 6000D, doyenne des courses trail (33 ans!), au coeur de la Savoie où j'ai grandi et à qui je dois mon amour pour la montagne. Je suis aussi quelqu'un qui croit aux signes, et que rien n'arrive par hasard. Mektoub...


6h du mat, les valises sont bouclées, direction l'aéroport. Tiens, ça gigote dans le sac à dos, on dirait bien que je ne suis pas seul Salut Cornichon, on joue les passagers clandestins? La petite loutre-doudou que mon fils a laissée à la maison ne voulait pas rester seul. Cornichon, car je l'ai ramenée de mon trail dans la Spreewald, d'où c'est la spécialité. En plus, outre la couleur on dirait vraiment un cornichon. Allez je t'emmene, si tu promets d'être sage et de laisser mon sandwich tranquille. 



Nous voila dans un avion pour Munich, puis un second pour Genève. Aterrisage au dessus du lac avec les sommets enneigés des Alpes en arriere-plan, magnifique.





La suite en train, nous passons rapidement la frontiere pour entrer au pays. Nous voila dans un avion pour Munich, puis un second pour Genève. Aterrisage au dessus du lac avec les sommets enneigés des Alpes en arriere-plan, magnifique. a sent déjà le fromage, à moins que ce soit mon sandwich? Un dernier train nous embarque à Aix-Les-Bains, direction Aime. La journée s'est passée comme sur des roulettes, et bien sûr, ça ne pouvait pas finir comme ça! A 40km de Aime, le train tombe en panne et je profite de deux heures d'attente dans un wagon non climatisé, avant qu'ils nous remorquent et nous changent de train. Enfin, ça aurait pu être pire (c.f. mon article sur l'Eco-Trail de Paris).


Il est 20h30 quand nous arrivons enfin à la gare d'Aime-La-Plagne. Je fais pas 10 mètres avant de tomber sur... un distributeur de fromage! 🧀 Beaufort et Reblochon 24h/24. Vibe la République, et vive la France 😍


Petit coup de fil aux hôtes du gite qui viennent me chercher pour me faire grâce des 3km de grimpette jusqu'à Macôt. Nous voilà enfin arrivés, bien installés, et je profite d'une tasse de thé et du coucher de soleil sur les montagnes. 

Ça te plait Cornichon? Tu veux quel lit? Comment ça le même que le mien? Allez au dodo...


Vendredi 28 juillet / J-1, Visite du village expo

Fort de mes experiences passées, j'ai prévu une journée tranquille sur place avant la course, histoire de reposer les jambes (ce que je n'ai pas vraiment fait) et profiter du programme. En effet, la station est en fête pendant 4 jours, avec un village expo et plusieurs courses organisées. 




Après un petit-déj du tonnerre préparé par notre hôte Marie-Helène, fine cuisiniere qui fait des merveilles avec la rhubarbe de son jardin, Cornichon et moi descendons à pieds à la station. Le soleil est de la fête, le ciel est bleu, strié des ombres colorées des parapentes qui dansent au dessus de l'horizon avant de venir se poser dans les vergers, à quelques mètres de nous. Un calme presque religieux baigne la vallée, très vite troublé par les clameurs qui montent du centre-ville. La fête à déjà commencé !




Je commence par chercher mon dossard où une foule de volontaires souriants nous accueillent. Peu de coureurs, je pense que la majorité arriveront en fin de journée, après le boulot. Nous voilà ensuite au village 6000D, une vingtaine de tentes alignées le long d'un tapis rouge. Principalement des vendeurs, avec plusieurs grandes marques représentées, notamment Raidlight implantée à Saint Pierre de Chartreuse où j'ai grandi et qui y fabrique d'excellent sacs à dos trail, j'en possède un bien évidemment 🥰

Nous faisons un petit tour pour le plaisir, (rapide coup d'œil aux prix, oui oui juste pour le plaisir!). Puis je fais une razzia à la boutique officielle, les produits sont vraiment sympa. Je finis par aller chercher mon cadeau de participation, bof: Un porte dossard, un echantillon de shampoing et 350 pubs. Mais difficile de faire mieux que le Marathon du Médoc qui vous couvre de cadeaux ! En revanche, la vidéo 360 offerte est vraiment sympa, une idée originale.


Un petit tour par la buvette, salade de riz spartiate, puis direction l'espace détente pour une bonne sieste. Je papote avec quelques coureurs qui viennent d'un peu partout. Pas besoin de montagne chez soi pour être un trailer dans l'âme!



18h, Il y a de plus en plus de monde. Cornichon en a marre, on se décide à rentrer. J'hésite à chercher un resto, mais je crains l'assiette de spaghetti noyés dans la crème. J'opte plutôt pour un passage au supermarché et on remonte au gite avec un paquet de pâtes. On va se faire notre petite popotte. Les jambes râlent un peu dans la montée, qu'est ce que ça va être demain!



De retour au gite, j'ai la bonnes surprise de tomber sur 3 autres locataires: Antoine et Alexis deux copains et trailers de longue date, ainsi que René, un hollandais qui débarque tout juste de Utrecht... pour nous coller une raclée 😆 On y reviendra ! Tous sont inscrits à la même course: la 6D Marathon. Plâtrée de pâtes, souvenirs, trucs et astuces, on discute une bonne heure. J'en ressort rassuré sur certains points, tandis que le doute plane sur d'autres. Mais l'heure n'est plus à la réflexion. Je prépare mon sac, vérifie 3 fois que je n'ai rien oublié puis je me jette dans les bras de Morphée qui se fait un peu désirer... Est-ce que je suis prêt ? Comment va réagir mon corps demain au dénivelé, à l'altitude. Est-ce que je passerai à temps les barrières horaires? Cornichon me mord les doigts de pieds, chuuuut !


Samedi 29 juillet / Race day

4:40 - Les vibrations excitées de ma montre me tirent d'un sommeil bien trop court. Je pense aux coureurs de la 6000D qui doivent déjà être sur la ligne du départ. Il y a pas idée de commencer aussi tôt ! Je m'habille comme je peux, heureux d'avoir tout préparé la veille, je bourre Cornichon au fond de mon sac et je rejoins mes colocs qui sont déjà à table. Marie-Helène notre hôte à tout préparé, le café est prêt, on se croirait dans la tente des élites ! Nous sautons dans la voiture d'Antoine et je remercie le Saint Patron du Trail de pas avoir à descendre à pieds. 


Nous sillonnons les petites rues et abandonnons la voiture près de la gare. La ville est déjà en émoi, le départ de la 6000D vient d'être donné et les plus courageux sont déjà en route vers le glacier. Je laisse mon sac à la consigne et c'est le coeur gros que j'y abandonne Cornichon, qui de son côté est bien content de ne pas balloter pendant 7h dans mon dos. A tout à l'heure boule de poils, finis ta nuit !




5:30 - Je retrouve mes deux compatriotes sur le théâtre de pierres, juste devant l'église romane illuminée. Les ombres des coureurs s'agitent autour de nous: on vérifie son matériel, on passe par le porta-potti pour le pipi de la peur, on fait quelques longueurs de piste pour faire chauffer la machine, puis on rejoint le sas de départ. La tension monte, électrique, enivrante. Le speaker fait monter la sauce, un gigantesque écran lumineux égrène les minutes, puis les secondes restantes. Une ola agite tous les bras en l'air, plus que 30 secondes... J'ai la tête vide... Mes doutes, mes peurs, tout a été balayé par une excitation à son paroxisme. Plus que 10 secondes... Je lève les yeux vers les sommets que l'on devine dans le jour qui se lève. 3...2...1... MOTEUR, l'aventure commence!



6:00 / Aime La Plagne / 0km, 0m de D+

Nous nous élançons dans les rues de Aime, aux premières lueurs de l'aube. Il fait encore frais. Nous suivons la route principale qui nous conduit hors de la ville. La route nous annonce tout de suite la couleur: ça monte ! La plupart ont déjà sorti les bâtons, et le clac-clac résonne sur le bitume. En ce qui me concerne, j'ai pris les miens, mais je ne m'en suis encore jamais servi. Je les ai juste emportés lors de mes derniers entraînement histoire de tester où les accrocher, sac ou ceinture, et être sûr qu'ils ne ballotent pas trop. J'attends un peu pour les sortir. Quelques participants courent sans bâtons, question de goût !



Nous quittons rapidement la route pour nous enfoncer dans les bois par un sentier assez musclé. De mémoire (j'ai jeté un coup d'œil au tracé hier soir) je me souviens que la première grimpette est très abrupte: 850m de D+ dans les premiers 8km! Il est temps de dérouler les bâtons. Je me sens un peu pataud avec, mais mes années de ski me font vite trouver mes marques. Je relaxe mes bras et laisse les pointes se planter entre les racines et me hisser vers les hauteurs. Je suis à l'aise, je me cale sur le rythme des autres autour de moi, je double même quelques têtes essoufflées.



Le soleil franchit soudain la ligne de l'horizon, éblouissant. Toute la vallée s'illumine, comme un projecteur braqué sur nous. L'air est frais, vivifiant, les montagnes se dévoilent derrière le rideau des arbres. Nous progressons dans un silence presque religieux, chacun est concentré sur sa respiration, ses pas, les pointes de ses bâtons. La réalité me frappe alors de plein fouet: je suis au coeur des Alpes où j'ai grandis, il y a plus de 25 ans. Sur des sentiers si semblables à ceux que j'ai maintes fois parcourus avec mon grand père, mon parrain, et tant d'autres qui nous ont quittés trop vite. Je me sens chez moi, même si je suis ici pour la premiere fois.

7:00 / Bois du Tronchet / 4km, 500m

Le sentier se fait plus technique, il senfonce dans la forêt et suis un cours d'eau. Les coureurs se sont espacés, nous sommes en petits groupes. Je progresse bien, mais je me force à rester concentré sur le chemin. Nous longeons des petits ravins le long d'un sentier cahoteux et tout faux pas pourrait se révéler fort désagréable. C'est assez nouveau pour moi. Même si je passe beaucoup de temps en forêt, c'est dans l'ensemble sur des sentiers larges et très roulants. Il m'arrive souvent de consulter mon portable et répondre à un message en courant, impossible ici. Ça me plait: les bâtons occupent les mains, le chemin occupe la tête, le portable reste dans la poche ! Par contre j'ai faim et j'attaque rapidement les réserves. Le ravito est encore loin.




7:30 / La Roche et Piste de Bobsleigh / 8km, 900m

Nous continuons à longer le cours d'eau, passons d'un côté puis de l'autre. Je double quelques coureurs tranquilles, puis la forêt s'efface. Nous sommes arrivés à La Roche, au pied du télésiège. Tout est calme, le silence seulement troublé par quelques moto-cross qui réajustent le balisage. Les petits chalets nous regardent passer. Une cloche retentit soudain, c'est un groupe de bénévoles qui nous indique le chemin jusqu'à la piste de Bobsleigh. La voici enfin, long serpent de pierre qui senroule sur lui même avant de s'élever sur le flanc de montagne. 





C'est un des passages mytique de la course que j'attends avec impatience. Ça n'est pas tous les jours que l'on peut gravir une piste de bob, en général ça se pratique plutôt dans l'autre sens ! Heureusement, pas de glace aujourd'hui, la pierre est dure et lisse. Je m'élance dans le boyeau étroit, c'est le moment de dérouler un peu la foulée, après quasi 2h de marche. La radio fredonne au dessus de ma tête, que je baisse régulièrement pour éviter le plafond bas dans les grands virages qui déforment la piste à la verticale. Faut vraiment être givré pour faire un sport pareil! Je parle du bob bien sûr 🤪


Je quitte la piste sous les applaudissement des bénévoles et le crépitement des flashs. Je suis peut être le premier, qui sait ! Le soleil a fini de se lever, éblouissant. Petit coup d'œil au portable pour lire les encouragements de la famille qui me suit sur le live trail, et encourager à mon tour mon beau-frère qui s'élance "aux côtés de" Pau Capell et Robert Hajnal sur la Bucovina Ultra Rock, une course au nord de la Roumanie. Mais non je suis pas jaloux! 😭




Je rejoins un groupe ce coureurs Belges qui ont fait le déplacement ensemble. Ça me rassure un peu de ne pas être le seul à venir d'un coin aussi plat qu'une crêpe bretonne! Comme mon coloc hollandais d'ailleurs, où est-il passé celui là ? La grimpette reprend, les petits sentiers joueurs remplacent le bitume ennuyeux. Et c'est la lente ascension vers la station de La Plagne, notre première barrière horaire à franchir avant 10h. Nous marchons d'un pas régulier et tranquille, échangeons de brèves paroles, nous arrêtons ici et là pour prendre une photo du paysage. A chaque pas la vallée se dévoile un peu plus à nos yeux. Après un grand virage, le sentier s'élève à nouveau et les bâtons sont mis à rude épreuve. Nous arrivons enfin en vue de la station où il nous fait redescendre. Première étape de bouclée!





9:00 / Ravito Plagne Centre / 15km, 1400m

J'arrive au ravito à 9h pile, soit 1h avant la barrière horaire. Tranquile, comme on dit dans le Sud Ouest ! Je m'accorde 5 min de pause, le temps de remplir les flasques et manger un morceau. Je me connais, je suis un vrai squatter, je peux passer 15-20 min facile à un ravito, à dévaliser les stocks en papotant avec les bénévoles ! Mais aujourd'hui pas question de laisser les jambes se relâcher avant le sommet. Je tente le saucisson? Allez, pourquoi pas, c'est bien pendant les courses qu'il faut faire des essais non ?




C'est parti pour la derniere grimpette, 5km d'ascension pour gagner le Lac des Blanchets, point culminant de la course. Je fais un check up rapide, tout va bien: les jambes sont en forme, la tête toujours alerte, pas de douleur particulière. Ca tire bien dans les mollets, mais jusque là rien d'inquiétant. Le paysage est à couper le souffle. La végétation se rarifie et nous avons une vue somptueuse sur la station et la vallée. Il fait un temps de rêve, aucune trace des oranges prévus dans la journée. Croisons les bâtons !




Je prends une grande bouffée d'oxygène et je double quelques têtes essoufflées. L'altitude est un de mes gros points d'interrogation sur cette course. J'ai encaissé pas mal de dénivelé à l'entraînement, mais avec des répétitions sur la petite colline du parc de Humbolthain près de chez moi, et beaucoup de marches d'escalier. J'ai lu pas mal de choses sur l'adaptation du corps en haute montagne, mais j'imagine qu'on est plutôt safe à cette altitude. Dans un coin de ma tête j'espère qu'il va se produire déclic, que le petit garçon de la Savoie va s'éveiller et trouver ses marques.






10:00 / Lac des Blanchets / 20km, 2364m

Les derniers kilomètres jusqu'au sommet sont magnifiques. Nous suivons un chemin tortueux, avec quelques passages où je n'aurais pas aimé me retrouver tout seul de nuit. Nous franchissons le Col de la Grande Forcle et son lac en forme de coeur. C'est fini ? Que nenni ! Une derniere grimpette nous hisse jusqu'au Lac des Blanchets, à 2364 m, point culminant de la course. Un scan du dossard, une photo, c'est bon vous pouvez redescendre ! Tout ça pour ça ? Je prends quand même une minute pour souffler et admirer la vue. C'est pas tous les jours qu'on gravit la moitié du Mont Blanc, surtout quand on habite à Berlin!





10:30 / Bellecôte / 23km, 1800m

En avant pour la descente, et ça commence plutot sec. Le chemin est étroit, encombré de pierres glissantes. Mes bâtons s'accrochent dans les bosquets, je ne sais pas trop comment m'en servir pour amortir ma chute. Rapidement nous arrivons au ravito de Bellecote, où je m'attarde un peu plus, histoire d'être plus léger pour la descente. Il y a une super ambiance, les bénévoles souriants se plient en quatre pour nous, tout le monde nous encourage, ça donne vraiment la pêche. Je me force à repartir, malgré le fromage et le saucisson, c'est pas encore l'heure de l'apéro !



Nous quittons la route pour des chemins forestiers plus larges, et je découvre les joies de la descente. Je range les bâtons, ils ne me sont plus d'aucun secours. Ce sont mes quariceps qui prennent le relais, et c'est pas une promenade de santé ! Mon cruel manque d'expérience en descente se fait sentir. Comment m'adapter à la pente raide? Freiner et contrôler ma vitesse au risque d'épuiser toute mon énergie et risquer les crampes? Ou lever le pied et me laisser emporter, au risque de trébucher ou rater un virage ? J'imagine que la solution est entre les deux. J'y vais donc à l'instinct, je laisse mes jambes me guider, comme pendant les longues séances d'escaliers, quand ma tête se mettait en stand-by.



Je me fais doubler par plusieurs coureurs à des vitesses fulgurantes, surtout des filles plus légères et plus agiles. Mais aussi par des coureurs de la 6000D, bien qu'ils soient partis une heure avant nous en aient fait deux fois plus de bornes. Nous sortons de la forêt de Macôt, face à la vallée qui s'étend loin en contrebas. Un petit ravito nous offre à boire, puis nous entamons la descente sur Montchavin.



12:00 / Montchavin / 32km, 1200m

Nous entrons dans Montchavin et le village des Coches sous le son des cloches que j'adore. Beaucoup de gens sont dehors et encouragent les coureurs. Le ravito est caché au détour des petites ruelles étroites, on le manquerait presque si ce n'est pour la super ambiance. 


C'est la dernière barrière horaire, et pour beaucoup j'imagine la fin de l'angoisse. À partir de ce point, on peut finir à son rythme, sans une épée de Damocles au dessus de la tête. J'ai lu des témoignages de coureurs qui ont été éliminés pour être arrivés quelques poignées de seconde après la limite de temps. Ça doit être vraiment dur, après tant d'efforts.



Je reprends la route une fois les flasques remplies. J'ai avalé un peu trop de Tucs et de fromage (c'était pas du Beaufort, dommage). Bobo au ventre, qui commence à réclamer un vrai repas. Mais nous ne sommes plus très loin de l'arrivée et de la pasta-party ! Les derniers kilomètres de forêts sont tranquilles, rien d'exceptionnel. Nous suivons des sentiers boueux à travers des sous-bois aux arbres rares, parfois décimés par les incendis. La route en lacet s'achève sur une piste cyclable qui longe la rivière où des groupes font du rafting. Je double plusieurs coureurs qui ont l'air au bout du rouleau, se forçant à mettre un pied devant l'autre. Cela me rassure, j'ai encore assez d'énergie pour courir, mon approche prudente et tranquille de la course a porté ses fruits une fois de plus.














13:20 / Aime / 42km, 0m

La piste cyclable se termine à l'entrée d'Aime, dans le virage que nous avons franchi au lever du soleil, qui est maintenant haut dans le ciel et baigne la ville d'une douce chaleur. Le dernier kilomètre est féerique, nous entrons dans la ville sous les cris et les encouragements des gens aux terrasses des cafés. Un virage, un autre, encore un... Je débouche au milieu du village expo, sous une pluie d'applaudissements. Mon dossard est scanné et j'entends le speaker prononcer mon nom et me féliciter, tandis que je fais le tour de l'église sur le tapis rouge et rejoins un père de famille qui franchis la ligne en tenant ses deux enfants par la main. Petit pincement au coeur en pensant à ma belle et mes deux loulous qui sont bien loin. J'aurais tant aimé partager cet instant avec eux.






Je franchis la ligne d'arrivée au bout de 7h et 26min, pour 43km de course et 2100m de dénivelé. Une grande victoire pour le citaden que je suis et un beau cadeau pour le petit garçon qui a grandit en Savoie et rêve de montagnes toutes les nuits. L'arrivée est magique, les bénévoles au top comme tout au long de la course. Un grand bravo et merci à eux ! Je récupère mon tee shirt finisher (pas terrible je dois dire, je m'attendais à mieux). Ils n'ont plus la version 6D et m'offrent un modèle 6000D, c'est un signe, il va falloir revenir vite :)



14:00 - Je retrouve Antoine et Alexis au village expo, qui ont fini il y a une bonne heure. Bière, plâtrée de pâtes bolognaise, on se raconte notre course. Aucun signe de notre coloc hollandais. Etait-il devant ou derrière ? Je les abandonne enfin. Si il y a une chose que je désire plus que tout après une telle course c'est ue bonne douche chaude ! Je récupère mon sac et un Cornichon surexcité qui a mangé toutes mes barres de protéines. Direction le gymnase. Puis je reviens vers l'église où sont installés masseurs et kinés. Cornichon et moi profitons d'un massage bien mérité dispensé par les mains expertes de Chloée.



16h - Retour à la buvette, j'ai l'estomac dans les talons ! Tandis que Cornichon me pique mes merguez, une petite fille me prépare une crêpe débordant de confiture. Ça commence à aller mieux ! Il ne manque plus qu'une petite sieste ! Mais avant ça, je passe par le stand de Dawa Sherpa et sa fondation Enfants du Nepal, que j'ai repéré plus tôt. C'est avec grand plaisir que je lui serre la main et qu'il me dédicace son livre. Un grand champion, finisher du tout premier UTMB. Je ne savais pas qu'il courrait la 6D aussi aujourd'hui. Bizarrement, je ne l'ai pas croisé sur la route !

Je m'installe enfin dans l'herbe, sous les applaudissement ininterrompus de la foule pour les finishers qui arrivent au compte-goutte. Je me sens bien, comblé. Les jambes ne font pas encore mal, le massage a relaxé le dos, la tête est vide,  le ventre est plein. Je sombre dans un doux sommeil tranquille, bercé par les ronflements de Cornichon.


17:30 - Après un bref passage par la salle des fêtes pour une conférence où on était cinq, je rejoins le théâtre de pierres pour la remise des prix. On sait jamais, j'ai peut être fini premier ! Le speaker a la voix détruite à force de crier toute la journée, les gagnants défilent sur le podium, les prix passent de mains en mains. Je suis frappé du jeune âge de la plupart des gagnants, souvent en dessous de 20 ans. Le Trail est un sport incroyable, riche de jeunes talents et vieux briscards !

Tout à coup, des voix se mettent à hurler derrière nous. La dernière coureuse vient de passer le virage et se dirige douloureusement vers la ligne d'arrivée. 14:30 de course pour franchir les 69km et vaincre la montagne. La foule s'enflamme, se lève et applaudis à se rompre les mains. La coureuse rassemble ses dernières forces pour courir les derniers mètres. Elle pleure de joie, tandis que le speaker l'entraîne vers le podium où on lui rement le prix du dernier coureur, celui qui sonne la fin de la course. Je repense à la Diagonale Des Fous, où l'on acclame autant le premier que le dernier, et je me répète pour la millième fois aujourd'hui que ce sport est formidable.

18:30 - Tandis que l'on récompense enfin les gagnants de la 6000D, et l'incroyable duel qui a opposé Jan Baudet et Baptiste Chassagne jusqu'à la dernière minute, le tonnerre retentit et le ciel déverse une pluie torrentielle sur nous. On nous a promis l'orage, il aura attendu les derniers instants de la course pour éclater. Je réussi à me dégotter un chauffeur pour me ramener à la pension, et pas des moindre: la police de la Plagne ! Merci encore mesdames.




20:00 - De retour à la pension, je retrouve mon colloc hollandais. Les deux autres ont déjà repris la route. Nous partagons une tasse de thé en parlant de la course. Pas étonnant qu'on ne se soit pas vu, il l'a bouclée en 4h30, sans bâtons et en jouant des coudes avec Dawa Sherpa dans la descente. Respect ! Direction dodo bien mérité où Cornichon ne m'a pas attendu.

Dimanche 20 août / Retour au bercail 

9h - Je profite de mes dernières heures de vacances devant un bon petit déjeuner, tome de Savoie et crumble à la rhubarbe ! Merci encore à Marie-Helène et Sylvain pour leur accueil chaleureux. Je descend tranquillement à la gare. Pas trop de courbatures encore, même si les quadris sont un peu raides. Ca va venir. 



Train à 10:30 pour rejoindre Genève, puis vol pour Berlin. Je serai à la maison dans la soirée. Sans oublier bien sur de dévaliser le distributeur de fromage et rapporter 1kg de Beaufort et Reblochon. Dieu que j'aime mon pays 😍



Compte-rendu de mission

Tellement de choses à dire sur cette course, qui peuvent finalement se résumer en quelques mots: J'ai passé un week-end phénoménal, stratosphérique pour reprendre le terme à la mode ! Premier maratrail de montagne avec un dénivelé digne de ce nom, tout en restant assez peu technique, au final. Je ne pouvais rêver mieux pour une première expérience. C'était surtout pour moi l'opportunité de découvrir une facette incroyable de ce sport que je ne connaissais que dans les magazines et par les images de nos élites qui nous font vibrer. Enfin, quel plaisir de remettre les baskets en Savoie, pour moi la plus belle région de France, où j'ai grandi et où j'espère revenir très bientôt. Dans un an peut-être, pourquoi pas, on se retrouve en haut du glacier !



Infos et Liens

Gite et chambre d'hôte Malezan, chez Marie-Hélène et Sylvain